14.5. Migrant·e·s âgé·e·s et retraité·e·s

Protection maladie selon le statut

Article mis à jour le 18/11/2025

Les migrant.e.s âgé.e.s bénéficient d’une protection maladie dans les conditions de droit commun selon leur statut professionnel (en activité, pensionnés, sans activité ni pension…). Les étrangers sont soumis aux conditions spécifiques de régularité du séjour. S’ils sont nouvellement arrivés en France, ils devront également satisfaire à la condition d’ancienneté de présence de plus de 3 mois voire 6 mois sur le territoire (affiliation à l’Assurance maladie + C2S ou Aide médicale Etat, voir 14.2). Les migrants âgés titulaire d’une carte de séjour mention « retraité » peuvent prétendre à l’Assurance maladie lors de leur séjour en France.

Principes généraux

Le rôle déterminant de la condition de résidence habituelle en France. Selon la réglementation française et pour l’ensemble de la population, le bénéfice des droits sociaux (sauf versement de la pension de retraite et de la rente AT/MP, accident du travail/maladie professionnelle) est conditionné à la résidence habituelle en France. Cette condition pose des difficultés aux migrant.e.s âgé.e.s qui souhaitent vivre leur période de retraite entre la France et leur pays d’origine :

  • elle exclut du bénéfice des droits sociaux les étrangers ayant transféré leur résidence hors de France et qui reviennent temporairement visiter leur famille ou leurs amis. Cependant, depuis la loi du 22 décembre 2018, les simples passages en France à l’occasion de voyage temporaire permettent, en théorie, de bénéficier d’une protection maladie de droit français ;
  • les titulaires de la carte de séjour mention « retraité » qui se ré-installent définitivement en France rencontrent encore souvent des difficultés liées à la présomption de résidence habituelle hors de France attachée à cette carte selon les organismes français de protection sociale ;
  • les migrant.e.s âgé.e.s subissent en outre un certain nombre de contrôles et restrictions de la part des services de l’Etat (nombreux contrôles des Caisses d’allocations familiales à l’égard des personnes âgées résidant en foyer, refus d’enregistrement des déclarations d’impôts sur le revenu de la part de l’administration fiscale à l’égard des personnes supposées ne pas résider en France).

La personne possède une carte de séjour et atteint l’âge de la retraite. Les étrangers résidant en France qui atteignent l’âge de la retraite et se voient accorder une pension conservent le titre de séjour dont ils bénéficiaient au moment de la cessation de leur activité professionnelle. La carte de séjour (certificat de résidence pour les Algériens) mention « retraité », valable 10 ans (ne pas confondre avec la « carte de résident » de 10 ans), ne vise que des personnes souhaitant transférer leur résidence hors de France et y maintenir un « droit de visite temporaire ». Cette carte de séjour, qui se substitue à la carte de résident, permet de revenir en France par tranche d’un an consécutif maximum et fonctionne comme un visa permanent. Mais le titulaire d’une telle carte ne peut plus bénéficier de droits sociaux lors de ses séjours temporaires en France, étant présumé avoir transféré sa résidence hors de France. Cette restriction ne concerne pas la prise en charge des frais de santé en France. En effet les frais pour des soins inopinés, comme pour des soins programmés, sont pris en charge lors de séjours temporaires en France.

La pension de vieillesse contributive de la sécurité sociale (la « retraite ») est exportable au pays d’origine (augmentée éventuellement d’une retraite complémentaire). C’est la seule prestation sociale de droit français qui n’est pas liée à la condition de résidence habituelle en France.

Quel que soit leur âge, les migrants/étrangers sont soumis aux dispositions de droit commun. Les personnes de passage en France n’ont pas droit à une protection maladie, et les personnes nouvellement arrivées en France sont soumises à des restrictions spécifiques (voir 14.1). Les paragraphes suivants font le point sur l’Assurance maladie (protection de base).

Sans activité professionnelle, ni pension de retraite, la personne résidant habituellement en France relève soit de l’Assurance maladie en cas de séjour « régulier », soit de l’Aide médicale Etat en cas d’une durée supérieure à 3 mois de séjour irrégulier et faibles ressources.

Titulaires d’une pension de vieillesse servie par une caisse française

Titulaire d’une pension de vieillesse servie par une caisse française et résidant en France. La personne titulaire d’un des titres de séjour cités dans l’arrêté ministériel du 10 mai 2017, l’instruction ministérielle DSS du 15 janvier 2019 ou dans la circulaire Cnam du 9 juillet 2019 est affilié à l’assurance maladie sur le fondement de l’article L160-1 du Code de la sécurité sociale (CSS).

Titulaire d’une pension de vieillesse servie par une caisse française et résidant hors de France. Le plus souvent dans la pratique, la personne ne parvient pas à faire ouvrir ses droits à l’Assurance maladie lors de ses séjours temporaires en France, ni en qualité de pensionné de droit français, ni au titre de la « résidence ». Voir infra les titulaires de la carte de séjour « retraité », et les précisions sur les accords internationaux de sécurité sociale et les accords franco-algériens de sécurité sociale.

Les pensionnés d’un régime de retraite français ne résidant pas en France bénéficient de la prise en charge des frais de santé lors de leur séjour temporaire en France, que les soins soient inopinés ou programmés. L’article L160-3 CSS prévoit en effet le bénéfice de la prise en charge des frais de santé pour les titulaire d’une pension de retraite ou rente de vieillesse ou d’une pension de réversion lors de leur passage en France. Le droit prévoit deux conditions à remplir pour en bénéficier :

  • que la pension, rente ou allocation de retraite soit servie par un organisme français ;
  • avoir cotisé pendant au moins 15 ans en France (restriction mise en place en 2019).

Il existe deux exceptions : pour les personnes ayant cotisé moins de 15 ans mais étant « mono-pensionnées » (retraite de caisse française uniquement) ; ou si le pays de résidence habituelle relève d’une convention prévoyant la compétence de la France pour une assurance maladie dans l’autre Etat de résidence (Andorre, Nouvelle Calédonie, Polynésie française, St Pierre et Miquelon, Maroc, Tunisie, Bosnie Herzégovine, Kosovo, Macédoine, Serbie, Monténégro, Québec uniquement pour les français.e.s).

Les membres de famille ayant droit (et non résidant). Seuls les mineurs à la charge des retraités peuvent être ayant droit (article L160-3 CSS). Les personnes à charge majeures ne peuvent bénéficier de la prise en charge des frais de santé que dans le cadre de règlement européen ou si une convention bilatérale le prévoit,  article L 60-4 CSS).

Affection longue durée. L’article L160-3 CSS, procédure Cnarefe, permet la prise en charge des frais de santé par l’assurance maladie mais ne donne pas accès à la Complémentaire santé solidaire soumise à une condition de résidence habituelle en France. En cas de reconnaissance d’une affection longue durée (ALD), une prise en charge des frais de santé liés à cette affection est cependant possible. Le médecin traitant ou le médecin hospitalier pourra se prononcer sur la possibilité d’une ALD. Attention en cas d’hospitalisation, même dans le cadre d’une ALD, le forfait hospitalier reste à la charge du patient.

Le Centre national des retraités de France à l’étranger (Cnarefe), organisme compétent :

  • son rôle est de contrôler l’ouverture des droits et affilier le pensionné résidant à l’étranger (création ou mutation de l’ancienne caisse d’affiliation, selon la situation ; émettre la carte vitale ; et gérer les dossiers et procéder aux paiements des soins reçus lors d’un séjour en France ;
  • coordonnées : Cnarefe, Cpam Seine-et-Marne, 77605 Marne-la-Vallée, téléphone : 01 84 90 10 05, du lundi au vendredi de 8h30 à 17h (heures françaises), internet ameli.rfe.fr ;
  • première démarche : remplir les 4 rubriques du formulaire en ligne (www.ameli.rfe.fr) : identité, coordonnées, régularité du séjour, pièces à joindre.

Obstacles. La procédure Cnarefe fonctionne très bien pour les Français ou les citoyens UE/EEE/Suisse ayant établi leur résidence hors de la France. Mais son application est très restrictive dans la pratique pour les étrangers non UE/EEE/Suisse sans carte de séjour mention « retraité » en raison de restriction juridiquement contestables :

  • exigence de justification d’un séjour régulier alors que l’article L160-3 est conçu comme une modalité dérogatoire à l’article L160-1 sur l’exigence de la résidence stable et régulière ;
  • limitation de la justification de la régularité de séjour à la carte de séjour ou certificat de résidence pour les Algériens, portant la mention « retraité », et au visa Schengen, à l’exclusion de tout autre visa.
  • les personnes retraitées parvenant à obtenir un visa Schengen sont renvoyées vers l’assurance du visa.

Titulaires de la carte de séjour mention « retraité »

Les titulaires de la carte de séjour mention « retraité » bénéficient de la prise en charge des frais de santé lors de leur séjour temporaire en France. La carte de séjour mention « retraité » n’est ni une carte de séjour temporaire ni une carte de résident. Elle est définie par l’article L426-8 du Ceseda selon lequel une des conditions d’obtention de cette carte est que l’étranger « a établi ou établit sa résidence habituelle hors de France ». Cette carte, valable 10 ans, autorise l’étranger qui perçoit sa retraite française au pays de résidence à se rendre en France pour des séjours temporaires (maximum 1 an consécutif). Il s’agit d’une sorte de visa permanent plutôt que d’un titre de séjour.

Attention à la substitution de la carte de résident par la carte de séjour « retraité ». Certains étrangers âgés, titulaires d’une carte de résident de dix ans (ou « certificat de résidence » pour les Algériens), se voient proposer de substituer leur carte de séjour par une carte de séjour mention « retraité » sans en mesurer les conséquences sur l’accès aux droits. En effet, bien que valable également dix ans, la carte de séjour mention « retraité » n’est pas un titre de séjour ordinaire en ce qu’elle présume une résidence habituelle hors de France. L’adresse de domicile inscrite sur la carte de séjour mention « retraité » est hors de France. Elle s’adresse donc à des personnes faisant le choix de retourner définitivement dans le pays d’origine. Elle permet de garder la possibilité de venir en France sans visa pour des séjours temporaires, mais entraîne la perte de la qualité de « résidant en France » et donc la perte des droits sociaux hormis la pension de retraite et la rente AT-MP. La prise en charge des frais de santé est possible lors de séjours temporaires en France.

Certains titulaires de la carte de séjour « retraité » peuvent cependant être considérés comme « résidant en France » au sens du droit social et fiscal (voir 14.1) :

  • les titulaires de carte de séjour « retraité » sont autorisés à vivre en France « par période d’un an maximum » (art. L426-8 Ceseda), et certains résident ainsi l’essentiel du temps en France. Il est donc possible qu’un titulaire de la carte de séjour « retraité » remplisse la condition de résidence en France exigée pour l’accès aux droits sociaux ;
  • la condition de résidence exigible en droit social ne peut pas être écartée par le Ceseda. La notion de résidence habituelle en France pour les prestations sociales, calquée sur le droit fiscal, est une condition de fait. Le titulaire d’une carte de séjour « retraité » vivant en France y déclare et y paie ses impôts.

Attention : l’octroi de droits sociaux en France (C2S, APL, Aspa…) risque d’empêcher le renouvellement du titre de séjour « retraité » dès lors que la personne ne remplira plus la condition de résidence hors de France nécessaire au renouvellement de ce titre de séjour.

Titulaire d’une pension servie par une caisse étrangère et résidant hors de France

En cas de séjour temporaire en France, les personnes assurées dans leur pays de résidence peuvent soit utiliser leur Carte européenne d’assurance maladie (personne assurée dans un pays EEE ou en Suisse), soit faire jouer une éventuelle Convention bilatérale de sécurité sociale. Dans le cas de l’Algérie (et du Maroc), la Convention franco-algérienne (et franco-marocaine) limite ce cas de figure au salarié (et à certaines conditions, à ses ayants droit) – ce qui exclut les pensionnés notamment retraités, et fonctionnaires – pour les seuls soins inopinés, ou avec entente préalable de la caisse algérienne (ou marocaine) pour des soins programmés notamment pour le suivi d’une maladie chronique.

 

En cas de transfert de résidence en France. Si des droits sont exportables vers la France, l’organisme du pays de provenance doit émettre un document à destination de la caisse française mentionnant le maintien et transfert des droits. Pour les pays UE et assimilés, il s’agit du formulaire S1 ‑ anciennement E106, E109, E120, E121. Se référer au site du Cleiss (Centre des liaisons européennes et internationales de sécurité sociale) pour les informations pratiques. Selon la Convention franco-algérienne de Sécurité sociale, les pensionnés (retraités) algériens de droit algérien (ce qui exclut les salariés et fonctionnaires) pourraient prétendre exporter des droits aux prestations en nature de l’Assurance maladie à l’aide du formulaire SE 352‑08 II. Mais en pratique (selon le Cleiss), les caisses algériennes considèrent que la Convention franco-algérienne ne s’applique pas dans ces situations. Se référer au site du Cleiss pour les informations pratique.

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Références bibliographiques

Pour en savoir plus 

Gisti, Comede, La prise en charge des frais de santé des personnes étrangères par la sécurité sociale, Les notes pratiques, 2021,